11 juillet 2006

Sans pesticides, (presque) sans labour ... mais avec une vraie rotation

Aux antipodes des techniques sans labour expérimentées par la Chambre d'agriculture de Bretagne, voici le témoignage de Michel Vion, paysan boulanger à Montravers dans les Deux Sèvres (79). Il travaille (presque) sans labour... et sans augmenter le risque pesticides : il est en bio !

"Laisser systématiquement de la végétation en surface en le conjuguant à un travail superficiel du sol" : telle est la définition des Techniques de conservation des sols (TCS) pour Michel Vion, installé sur une ferme de 22 ha, conduite en bio depuis 1987.

Ici, les prairies associées (60% SAU) sont le pivot d'un système qui alimente une douzaine de vaches limousines en plein air. Les céréales couvrent 8 à 9 ha et sont transformées en pain. Dès son installation, Michel a adopté des pratiques et des principes qui visent à préserver le sol : "Favoriser et nourrir la vie microbienne" sont les fondements de sa démarche, pour des raisons environnementales, mais aussi technico-économiques : "C'est un investissement pour l'avenir".

Chez lui, la pratique de faux semis a rapidement atteint ses limites : "Beaucoup de passages pour beaucoup de terre fine, souvent synonyme de battance et d'érosion". L'implantation d'engrais verts avant les céréales de printemps avait, à l'inverse, constitué un premier pas vers les TCS et donné des résultats intéressants : "Imagine le travail des racines de tournesol dans un sol, aussi efficace qu'un cultivateur !".

De plus, la production de fumier étant faible sur la ferme (environ 40 t/ an), Michel a très tôt recherché à apporter de la matière organique "pour nourrir le sol notamment en implantant des engrais verts : il faut les casser au bon stade, quand ils sont plus ou moins ligneux".
L'arrivée d'un voisin passionné de TCS a facilité ces changements : "Quand tu les penses à deux, tu les mets en pratique plus facilement". Michel a nettement réduit le nombre de passage des engins et travaille superficiellement le sol : "Un coup de disques pour casser les couverts et semis en combiné". Et le labour ? Culturellement parlant, le passage le plus difficile a été de pratiquer le labour à 12-15 cm : "alors que le climat ambiant dans la CUMA était de labourer à 25 cm…". Ce labour de surface peut être considéré comme un des seuls écarts aux principes de base des TCS, essentiellement pour retourner les prairies : "C'est le compromis entre gestion des mauvaises herbes et préservation des vers de terre". Et les pesticides ? Même en bio, Michel n'élude pas la question : "La meilleure solution est encore de labourer en surface une à deux fois maximum dans la rotation pour préserver la vie biologique du sol". Les résultats sont éloquents : "La structure s'est améliorée, la vie microbienne fonctionne bien". Michel s'est également aperçu que les sols présentent "moins de soucis" en cas de sécheresse "certainement grâce aux matières organiques qui retiennent mieux l'eau". Et économiquement ? "Depuis trois ans et malgré la sécheresse, les rendements en blé se stabilisent à 50 qx/ ha. Mais, je ne recherche pas de résultats sur le court terme. Je pense qu'à long terme, je m'y retrouverai". La rotation pratiquée demande encore à être testée dans la durée mais ces résultats sans ombre ont encouragé d'autres agriculteurs "du coin" à adopter cette conduite. Pour aller plus loin, Michel souhaite expérimenter le semis de blé directement dans le sorgho fourrager avec un semoir spécialisé et les engrais verts d'été directement dans les chaumes.


Sophie Pattée - Lettre de l'agriculture durable n°40 - Avril 2006

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