Pillage des forêts en Birmanie
Un nouveau rapport, présenté le 18 octobre à Bangkok par l'ONG anglaise Global Witness et intitulé « Un choix pour la Chine : en finir avec le pillage des forêts du nord de la Birmanie », passe en revue les preuves du pillage illégal des forêts birmanes par des entreprises d'exploitation forestière basées en Chine.
La majorité des coupes ont lieu dans une région reconnue comme « très probablement une des zones tempérées les plus riches en biodiversité du globe ».
En 2004 plus d'1 million de mètres cube de bois, soit environ 95% du total des exportations de bois depuis la Birmanie, ont ainsi été illégalement exportées depuis le nord du pays vers la province chinoise du Yunnan. Ce commerce, qui représente une perte annuelle de 250 millions de dollars pour le peuple birman, a lieu avec le plein accord de la junte militaire au pouvoir depuis 1962, des autorités chinoises et de la communauté internationale. Les compagnies et autorités locales chinoises, les représentants locaux de l'armée nationale (la Tatmadaw) et les groupes ethniques locaux (avec qui des accords de cessez-le-feu ont été passés) sont tous directement impliqués.
« Il y a en moyenne un camion chargé d'environ 15 tonnes de bois coupé illégalement qui traverse un poste de contrôle à la frontière chinoise toutes les 7 minutes, 24 heures sur 24 et 365 jours par an ; pourtant personne ne dit rien » d'après Jon Buckrell de Global Witness.
En septembre 2001 le gouvernement chinois a pris des engagements pour renforcer la coopération bilatérale et mettre ainsi fin aux violations répétées des lois forestières, notamment l'exploitation illégale et le commerce illicite associé. Mais les importations illicites de bois à travers la frontière birmano-chinoise ont en réalité augmenté de 60% depuis.
« Quelques hommes d'affaires chinois, appuyés par les autorités du Yunnan, sabotent totalement les initiatives du gouvernement chinois pour lutter contre l'exploitation illégale. Non seulement les activités de ces exploitants compromettent gravement les perspectives de développement durable dans le nord de la Birmanie, mais elle vont aussi à l'encontre de la loi chinoise », selon Buckrell.
En septembre 2004, les Etats membres de l'Union européenne ont appelée la Commission à faire « des propositions concernant l'exploitation illégale en Birmanie... ». En octobre, le Conseil européen a exprimé sa volonté de soutenir des programmes visant à résoudre « le problème d'une exploitation excessive et non-durable » qui conduit à la déforestation rapide de la Birmanie. Jusqu'à ce jour, l'Union européenne n'a toutefois encore rien concrétisé.
« Comme la Chine, l'UE a déçu le peuple birman. Jusqu'à quand les moyens de subsistance de ce dernier seront-ils mis en péril, avant que la Commission et les Etats membres de l'Union ne se décident à coopérer et à agir ? », demande Buckrell.
Il est donc primordial que le gouvernement chinois décide immédiatement de stopper les importations par la frontière birmane, et prenne d'ici là des mesures pour garantir la légalité du bois importé. Les autorités chinoises devraient également agir contre les entreprises et les fonctionnaires impliquées dans le commerce illégal.
Global Witness appelle donc à la constitution d'un groupe de travail afin de faciliter la lutte contre l'exploitation illégale, afin d'assurer une gestion équitable, transparente et écologique des ressources forestières, et pour permettre le développement durable du nord de la Birmanie.
« Il est vital que tous les acteurs impliqués travaillent ensemble pour stopper la déforestation rapide des forêts birmanes, et pour permettre à cette région très pauvre de bénéficier d'un véritable développement structurel », selon Jon Buckrell.
Ce rapport est téléchargeable sur le site internet de Global Witness (www.globalwitness.org).
Il sera prochainement traduit en français par les Amis de la Terre- France et Info Birmanie.
Les Amis de la Terre publieront également début 2006 un document d'information à destination du grand public sur le commerce du teck, un bois très recherché et dont 80% des réserves mondiales se trouvent en Birmanie.
Il y est en effet exploité dans des conditions sociales et écologiques alarmantes, notamment dans les régions frontalières proches de la Chine et de la Thaïlande. En l'absence d'une traçabilité fiable, il est probable qu'il en soit ensuite ré-exporté « légalement » vers les pays occidentaux consommateurs, notamment ceux de l'Union européenne.
Rappelons par ailleurs que le 24 octobre prochain marquera les 10 ans d'assignation à domicile d'Aung Suu Kyi, opposante birmane démocrate et Prix Nobel de la Paix. De nombreux acteurs politiques et associatifs s'activent d'ailleurs pour l'inscription prochaine de la question birmane à l'agenda du Conseil de sécurité des Nations-unies d'ici à la fin du mois.
télécharger le rapport de Global Witness
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