7 décembre 2005

Le recyclage du papier se heurte aux lois du marché

Situation inédite dans le recyclage des papiers-cartons. Pour la première fois, en 2004, la production nationale a été excédentaire : sur près de 6 millions de tonnes de papiers et cartons collectés pour recyclage, 500 000 tonnes n'ont pas trouvé preneur en France. Lors du salon Pollutec, qui se tient à Paris jusqu'au 2 décembre, les professionnels de la récupération se sont émus de cette situation qui concourt, selon eux, à une baisse des prix.

"Recycler les papiers-cartons a-t-il un sens ?", s'est interrogé, volontiers polémique, Serge Ponton, du groupe de collecte Coved. La réponse est oui, répond-il, mais "depuis trois ans, le taux d'utilisation du papier recyclé stagne, alors que le taux de collecte ne cesse d'augmenter" (+ 8,1 % en 2004), résume-t-il. "Cela se traduit par un cours faible de la matière première". La filière serait handicapée par le classement comme déchet des papiers et cartons collectés, qui entrave leur exportation. Mais aussi par l'encadrement du marché, que les récupérateurs souhaiteraient voir se libéraliser — avec, en ligne de mire, le levier des 350 000 tonnes issues du tri des emballages ménagers.

"Il ne faut pas penser la question seulement en termes de politique de l'environnement, mais aussi d'industrie et de marché", insiste Claude Platier, porte-parole de la Fédération de la récupération, du recyclage et de la valorisation (Federec). "Ces 500 000 tonnes d'excédent trouvent des débouchés à l'extérieur, mais les principaux clients, comme l'Espagne, se mettent aussi au recyclage." Dans cinq à sept ans, la Chine sera à son tour autonome sur ce plan : "L'emballage se délocalise là où il y a des produits à emballer."

FLUCTUATION DES COURS

L'industrie papetière française, dont 58 % de la matière première est constituée de papiers-cartons récupérés, voit les choses sous un angle bien différent. Pour Noël Mangin, délégué général de Revipap, groupement des papetiers utilisateurs de papiers recyclables, cet excédent de matière première constitue une chance au moment où certains industriels étudient des projets d'usines de papier en Europe.

"Au cours des cinq dernières années, rappelle-t-il, une seule unité intégrée de production de papier à partir de fibre recyclée a vu le jour en France, contre quatre en Allemagne, plus en avance dans la politique de collecte." La fluctuation des cours serait liée au décalage entre les besoins des papetiers, qui augmentent par bond — 300 000 tonnes pour une seule usine —, alors que la collecte de papiers et cartons, elle, progresse plus régulièrement.

"Il y a toujours eu des tensions fortes entre récupérateurs et papetiers, dans leur jeu d'offre et de demande", commente Yvan Liziard, directeur du département recyclage d'Eco-Emballages, société chargée par les pouvoirs publics de prendre en charge la collecte sélective et le recyclage des emballages ménagers. Ces tensions s'exacerbent au moment où ce système d'économie administrée, avec taxes (Point vert) et prix fixés visant à soutenir l'effort de collecte et de tri, est en phase de redéfinition.

Les contrats liant la majorité des collectivités locales à Eco-Emballages et leur assurant, au prix d'une mutualisation des coûts, une reprise des déchets triés, arrivent à échéance. Les récupérateurs se sont donc lancés à l'assaut des grandes collectivités locales, qui peuvent espérer négocier à un meilleur tarif de gros volumes de déchets. "On risque de passer d'un système transparent à un marché qui le sera moins", redoute Yvan Liziard.

source: le monde

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